La National Population Study on Prostitution (1984) a constaté que 92 % des Canadiennes et Canadiens sont d'avis que la prostitution existera toujours quoi qu'on fasse.284
Le temps des arguments d'ordre moral, religieux ou politique contre la prostitution est révolu. La réalité de la situation actuelle est que la prostitution a de moins en moins d'importance à cause de ces préoccupations, mais a de plus en plus d'importance à cause du sida, par exemple ce qui est important n'est pas d'éliminer la prostitution, mais de modifier le comportement sexuel des clients et des prostitués afin de réduire le risque de propagation du sida.285 [Traduction libre]
En 1985, on citait les paroles de Danny Cockerline qui disait que la plupart des gens qui contractent le VIH ou d'autres MTS, «l'ont sans l'avoir demandé.»
Lorsque nous blâmons les prostitués pour la propagation du sida dans la population hétérosexuelle, nous oublions qu'ils travaillent avec des femmes et des hommes qui essayent de maintenir autant que possible le contrôle sur leurs conditions de travail, y compris sur l'hygiène. Nous oublions que les prostitués, comme les non-prostitués, ne veulent pas contracter de MTS ou le sida.286 [Traduction libre]
Le document de 1998 intitulé VIH/sida : un document de travail, discute des schémas de stigmatisation et de discrimination que rencontrent les travailleurs du sexe à l'heure actuelle au Canada.
L'épidémie du VIH a amplifié et révélé la vulnérabilité des travailleurs du sexe face à la discrimination dont sont empreintes les attitudes, l'attention et les règlements. Les prostitués ont été qualifiés de vecteurs de transmission, une expression qui passe sous silence le fait que plusieurs utilisent le condom plus régulièrement que le reste de la population, qu'ils démontrent fréquemment plus de responsabilité que leurs clients et que ce sont ces personnes qui courent généralement un plus grand risque de contracter le VIH de leurs clients que l'inverse.287
Pourtant le travail du sexe n'a jamais été accepté au Canada. Dans l'un des premiers arguments publiés à propos du travail du sexe et des maladies transmises sexuellement au Canada, Nelson (1943) a écrit :
La seule méthode qui empêchera la propagation de l'infection par la prostitution est la répression constante et efficace de la prostitution, sous quelle que forme qu'elle puisse se présenter.288 [Traduction libre]
Cinquante ans après la publication de l'argument de Nelson, il est donc approprié que le dernier mot revienne au Canadien Gerald Hannon, professeur, rédacteur et travailleur du sexe :
Ce qu'il y a, c'est que nous serons toujours là parce que vous aurez toujours besoin de nous. Vous avez besoin de nous parce que vous avez besoin d'avoir des rapports sexuels, à certains moments, alors qu'il n'est ni possible ni pratique d'assouvir ce besoin avec quelqu'un d'autre. À vous de choisir. Vous pouvez choisir de nous faire du tort avec des lois et, du même coup, vous faire du tort à vous même, parce que l'hypocrisie brutalise toujours. Vous pouvez choisir de faire du tort aux communautés dans lesquelles nous vivons, ou vous pouvez choisir d'accepter. Vous pouvez choisir de travailler ensemble avec nous pour bâtir
une sorte
d'avenir
C'est vraiment à vous de choisir.289 [Traduction libre]