Au début des années 1980, les responsables de la santé publique commencent à parler de syndrome d'immuno-déficience acquise (maintenant appelé «sida»), et un rapport fédéral intitulé Prostitution et propagation des maladies transmises sexuellement (1984) est publié.91 Le rapport comprend une étude sur des travaux de recherche internationaux et sur les mesures législatives alors en vigueur au Canada et dans le monde touchant les MTS.

D'après ce document fédéral, certains jeunes hommes de 20 à 24 ans auraient joué un rôle décisif dans la propagation de la blennorragie; ils sont moins informés des risques de transmission des maladies par le sexe que d'autres groupes d'âge. Les auteurs concluent pourtant que les travailleurs du sexe «ne jouent pas un rôle important dans la propagation des MTS.»92 [Traduction libre]

Le Comité Fraser (1985) fait, lui, le lien entre prostitution et maladies transmises sexuellement. Il déclare qu'«une majorité de prostitués contractent une MTS au moins une fois pendant leur «carrière», mais la plupart connaissent très bien les problèmes associés à ces maladies, se rendent régulièrement dans des cliniques et prennent les mesures préventives nécessaires, en général en demandant à leurs clients de mettre un condom.»93 [Traduction libre]

Selon le Comité Fraser, les travailleurs du sexe savent quels sont les dangers liés aux MTS et qu'ils ont la réputation de les propager. Le Comité affirme pourtant que cette réputation n'est pas corroborée par les épidémiologistes.94

Shaver (1996) indique que les travailleurs du sexe hommes et femmes sont prudents face aux risques liés aux MTS. Les hommes et les femmes rapportent sensiblement le même nombre de maladies transmises sexuellement (0,77 et 0,70 épisodes respectivement). Vingt-sept pour cent des travailleurs du sexe hommes indiquent avoir contracté une MTS au cours des deux dernières années, et 10 % de plus déclarent en avoir contracté deux ou plus pendant la même période.

On notera toutefois que 63 % des hommes et des femmes rapportent n'avoir eu aucune MTS au cours des deux dernières années, ce qui laisse supposer qu'un petit nombre de travailleurs du sexe ont une infection chronique et non qu'un grand nombre ont une infection occasionnelle.95 [Traduction libre]

Références

91. HAUG, M. et CINI, M. Prostitution et propagation des maladies transmises sexuellement, Documents de travail sur la pornographie et la prostitution, Rapport no 7, Ottawa, Ministère de la Justice, 1984. [back]

92. BROCK, D. «Prostitutes are Scapegoats in the AIDS Panic», Resources for Feminist Research, 1985, vol. 18, no 2, p. 14.

93. COMITÉ SPÉCIAL D'ÉTUDE DE LA PORNOGRAPHIE ET DE LA PROSTITUTION (FRASER). La pornographie et la prostitution au Canada, Ottawa, ministère des Approvisionnements et Services, 1985, p. 395.

94. Ibid., p. 384.

95. SHAVER, F. «Prostitution: On the Dark Side of the Service Industry», dans Post-Critical Criminology, publié sous la direction de T. O'Reilly-Fleming, Scarborough, Ontario, Prentice-Hall Canada, 1996.